“Les inspections internationales doivent devenir obligatoires”

Une conférence ministérielle sur la sécurité nucléaire a débuté lundi à Vienne au siège de l’Agence internationale de l’énergie atomique, AIEA. La Suisse y participe avec une délégation composée de représentants de l’Office fédéral de l’énergie, du Département fédéral des Affaires étrangères et de l’IFSN. La Suisse s’engage ainsi en faveur d’un renforcement de la sécurité nucléaire dans le monde. Dans une interview, le directeur de l’IFSN, Monsieur Hans Wanner, commente les exigences de la Suisse.

IFSN: Une conférence ministérielle internationale sur la sécurité nucléaire débute le 20 juin au siège de l’AIEA à Vienne. La Confédération y sera représentée et vous ferez partie de la délégation suisse, Monsieur Wanner. Quels seront les thèmes abordés au cours de cette conférence?

Hans Wanner

Hans Wanner: Après les événements de Fukushima, l’AIEA a décidé de convoquer une conférence ministérielle pour la fin du mois de juin. Les événements de Fukushima y seront analysés, on étudiera aussi quels enseignements en tirer et comment améliorer les règlements internationaux ainsi que la collaboration internationale.

Comment en est-on arrivé à cette conférence ministérielle?

Les Etats du G8 s’étaient déjà réunis le 27 mai et avaient tiré de premières conclusions sur les enseignements de Fukushima: il faudrait notamment largement appliquer les normes internationales et contrôler régulièrement la sécurité de toutes les centrales nucléaires. Cette déclaration du G8 a servi d’input pour une première conférence ministérielle qui s’est tenue les 7 et 8 juin 2011 à Paris. Les pays membres de l’AEN (Agence de l’énergie nucléaire) de l’OCDE, et donc aussi la Suisse, participaient également à cette conférence.

 

 

La Suisse a-t-elle présenté des propositions sur la manière d’améliorer la coopération internationale?

Lors de la conférence de Paris, la conseillère nationale Doris Leuthard a exposé la position de la Suisse. Concrètement, la Suisse demande que l’examen des événements de Fukushima soit réalisé par des experts de l’AEN en étroite collaboration avec l’AIEA et que des experts externes renforcent partout dans le monde les instruments nécessaires à l’inspection de la sécurité des centrales nucléaires. Il s’agit essentiellement de trois instruments:

  • Inspection des bases légales de chaque pays, notamment de l’indépendance des autorités de surveillance
  • Inspection de la sécurité du fonctionnement des centrales nucléaires
  • Inspection du dimensionnement des centrales nucléaires concernant les risques naturels extrêmes, à savoir les tremblements de terre et les inondations.

Ces inspections sont actuellement encore facultatives. Mais nous pensons que ces missions internationales d’experts devraient être obligatoires.

Ces inspections internationales ne sont-elles pas déjà en place?

En Suisse comme dans les pays de l’UE, le contrôle de l’indépendance des autorités de surveillance est déjà obligatoire. Mais ce n’est pas encore le cas dans le reste du monde.

La Suisse souhaite-t-elle donc que ces inspections déjà obligatoires en Europe soient effectuées dans le monde entier et surtout aux Etats-Unis et en Russie?

Exactement, mais aussi dans la douzaine de pays qui souhaitent depuis peu recourir à l’énergie nucléaire. Fukushima nous a appris combien l’indépendance des autorités de surveillance est importante et combien il est important aussi que les centrales nucléaires puissent résister aux risques naturels potentiels affectant leurs sites. Or ces deux points ont manifestement manqué au Japon. C’est ainsi que l’indépendance des autorités de surveillance japonaises soulève des questions. De plus, les centrales nucléaires construites sur la côte japonaise n’étaient pas dimensionnées pour de très grands tsunamis. Des missions internationales ont permis d’identifier ces lacunes. Voila pourquoi nous demandons que des inspections internationales deviennent obligatoires.

Comment les exigences de la Suisse ont-elles été accueillies par la communauté internationale?

Nos exigences ont en principe été accueillies de manière positive. Certains pays nous ont explicitement assuré de leur soutien, mais ce sont surtout les grands pays qui ont eu une attitude plus réservée. Tous s’accordent toutefois à dire que la sécurité doit être améliorée partout dans le monde.

Des décisions seront-elles prises lors de la conférence ministérielle de cette semaine?

Les pays qui se rencontrent conviendront ensemble des mesures à prendre. Ils se mettront d’accord pour renforcer et améliorer au niveau international les inspections de sécurité indépendantes. Le mode précis d’amélioration des inspections sera élaboré dans des groupes de travail. Il est évident qu’il faudra améliorer l’information réciproque et le soutien réciproque. Il faudra aussi harmoniser au niveau international les mesures de protection d’urgence. Pour le moment, des différences subsistent encore d’un pays à l’autre.

Y a-t-il un calendrier de mise en œuvre?

Non, il n’y a pas encore de calendrier. Il est important maintenant que la communauté  internationale convienne des mesures devant être mises en œuvre et surtout appliquées partout.