Discussions autour du matériau de comblement d’un dépôt pour déchets radioactifs

Les galeries d’un dépôt en couches géologiques profondes doivent être comblées avec de la bentonite. Cette étape suit l’emmagasinage des déchets hautement radioactifs. Les propriétés de ce matériau font donc l’objet d’analyses approfondies. Le Forum technique sur la sécurité s’est penché sur ce matériau de scellement lors de sa 19^e séance du 28 novembre 2013.

Un dépôt en couches géologiques profondes doit retenir les substances radioactives à long terme. Dans ce processus, plusieurs barrières techniques et naturelles jouent un rôle. Après l’emmagasinage des conteneurs de déchets hautement radioactifs, les galeries de stockage doivent être comblées avec de la bentonite.

« La nature nous donne des renseignements précieux sur la manière dont ce matériau réagit, sur de longues périodes, à certains processus dans un dépôt », explique Meinert Rahn, chef de la section « géologie » auprès de l’Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN). « En plus de modélisations et d’expériences, les analogues naturels constituent des bases importantes pour notre travail. »

Enseignements tirés de la nature

Comme barrière, la bentonite possède de nombreuses propriétés favorables. Il est prévu que l’eau interstitielle, contenue dans la roche environnante, s’infiltre dans les galeries de stockage du dépôt. La bentonite gonflera alors, remplira les espaces vides et les calfeutrera. Il s’agit ici d’un des processus permettant de retenir les radionucléides à long terme. D’autres propriétés positives de ce matériau résident dans la bonne fixation des substances radioactives ainsi que dans sa stabilité à long terme. Ces aspects ont été présentés lors de la 19^e séance du Forum technique sur la sécurité.

La teneur en sel de l’eau (la salinité), la température ainsi qu’un environnement alcalin (des valeurs de potentiel hydrogène pH élevées) peuvent diminuer les propriétés favorables de la bentonite. Les interactions entre un béton avec un pH élevé et la bentonite ont été étudiées dans la région de Mangatarem aux Philippines. Il s’est alors avéré que la bentonite n’a perdu ses caractéristiques positives que dans une couche limite de quelques millimètres. Le tout s’est produit  lors de longues périodes géologiques.

Les chercheurs ont par ailleurs analysé les effets de températures élevées sur les propriétés de la bentonite. Pour ce faire, ils se sont penchés sur des gisements de bentonite à Kinnekulle en Suède. Ils ont pu déterminer que les transformations minéralogiques se déroulent très lentement. En comparaison, l’élévation de la température en raison des déchets hautement radioactifs emmagasinés est limitée dans un dépôt en profondeur. La période marquée par les températures élevées est nettement plus courte. Il est ainsi possible de partir du principe que l’influence de la température sur les caractéristiques de la bentonite sera faible. « De tels enseignements nous permettent de mieux évaluer les concepts de dépôts en profondeur », souligne Meinert Rahn.

Recherche internationale

Au niveau international, des questions relatives au comblement et aux ouvrages de scellement font l’objet de recherches. Plusieurs pays conduisent ainsi des expériences sur la bentonite. En Suisse, des partenaires internationaux participent à ces études au laboratoire souterrain du Mont Terri. Par exemple, les effets de la température sur la bentonite font actuellement l’objet d’une expérience avec corps chauffant.

Les chercheurs ont pu vérifier des modèles de calculs relatifs à l’absorption d’eau sur la base d’une autre expérience. Pour ce faire, ils ont comblé une galerie contenant un conteneur en acier avec de la bentonite. Le processus observé a permis de confirmer dans une large mesure les modélisations relatives à la saturation.

L’IFSN avait déjà contrôlé le concept de scellement de la Société coopérative nationale pour le stockage des déchets radioactifs (Nagra) en 2005. Cet examen avait eu lieu dans le cadre de la démonstration de stockage des déchets hautement radioactifs. L’IFSN avait à cet effet collaboré avec d’autres experts indépendants. Pour l’autorité de surveillance, il est nécessaire d’opérer des recherches supplémentaires en vue de construire de tels scellements. Jusqu’à ce qu’un dépôt en couches géologiques profondes se trouve en construction, de nouvelles connaissances issues de la recherche seront intégrées aux concepts de dépôts.