Dix ans après Fukushima du point de vue du conseil de l’IFSN : priorité de la sécurité sur les intérêts politiques et économiques

Andreas Abegg, président du conseil de l’IFSN

La sécurité doit être clairement prioritaire dans la zone de la tension entre la politique, la sécurité et le rendement économique. C’est l’une des leçons les plus importantes à tirer des accidents nucléaires de Fukushima. L’analyse qui a suivi a révélé, entre autres, le manque d’indépendance de l’autorité de surveillance et les dépendances du personnel au sein de l’industrie nucléaire.

Ce n’était pas une nouvelle leçon. La Convention internationale sur la sûreté nucléaire de 1994 exige la séparation effective de la surveillance des entités ou organisations impliquées dans la promotion ou l’utilisation de l’énergie nucléaire. L’imbrication de la politique, de l’industrie nucléaire et de la surveillance au Japon avait déjà été critiquée par une équipe internationale d’experts en 2007.

La séparation de la surveillance nucléaire d’influences politiques et économiques était également un sujet en Suisse avant et après Fukushima. Début 2009, la surveillance nucléaire a été séparée de l’administration fédérale et mise en place en tant qu’organisation indépendante et externalisée (l’Inspection fédérale de la sécurité nucléaire, IFSN), dotée de sa propre autorité de surveillance (le conseil de l’IFSN), notamment afin de réaliser l’autonomie requise de la surveillance. Après Fukushima, ces principes ont été confirmés et clarifiés par le Conseil fédéral dans le cadre d’une révision de l’ordonnance sur l’IFSN. L’indépendance de l’IFSN a également été abordée dans la mission IRRS (Service intégré d’examen de la réglementation, AIEA) en 2011 et fera l’objet de la mission IRRS de cette année.

Aussi à l’avenir, la séparation de la surveillance des influences politiques et économiques continuera à jouer un rôle central : à propos de la première désaffectation d’une centrale nucléaire, lors de la décision sur le choix du site des dépôts en couches géologiques profondes et lors de l’exploitation de la centrale nucléaire de Beznau, qui a plus de 50 ans, il existe des intérêts politiques et économiques substantiels, et la priorité doit être clairement donnée à la surveillance au service de la sécurité.

Suite à la décision de la Suisse de ne plus autoriser de nouvelles centrales nucléaires, une surveillance nucléaire indépendante avec un haut niveau d’expertise restera d’une grande importance pendant de nombreuses années. Sur la base des enseignements tirés du grave accident de réacteur survenu à Fukushima, le conseil de l’IFSN continuera à l’avenir d’exercer ses fonctions avec vigilance et indépendance, et de s’engager pour une séparation claire entre la surveillance de la sécurité d’une part, et les intérêts économiques et politiques d’autre part.

Andreas Abegg, président du conseil de l’IFSN