« Il ne s’agit pas d’un jugement contre l’IFSN »

Contrairement à ce qui apparaissait dans le compte rendu des médias, le jugement du Tribunal administratif fédéral concernant Mühleberg n’était pas un jugement contre l’Inspection fédérale de la sécurité nucléaire (IFSN). D’une part, nous n’étions pas partie dans cette procédure. D’autre part, dans son jugement, le tribunal a appuyé nos positions objectivement étayées et les décisions correspondantes des derniers mois.

Parmi elles, la chose suivante est à relever : nous devons opérer l’évaluation contraignante d’une centrale nucléaire en nous fondant sur les exigences valables dans les bases légales en vigueur. Si celles-ci sont atteintes, l’exploitation d’une centrale nucléaire peut être qualifiée de sûre. Je peux ainsi le réaffirmer : la centrale nucléaire de Mühleberg est sûre. Si cela n’avait pas été le cas, l’exploitant aurait dû l’arrêter depuis longtemps. Dans le cas où il n’aurait pas respecté cette exigence légale, nous nous serions occupés de mettre immédiatement la centrale hors service.

Un délai pour l’élaboration et la présentation d’un concept d’entretien ne peut être accordé que si aucun danger immédiat ne prévaut. C’est ce que prévoit le jugement du Tribunal administratif fédéral. La nouvelle situation créée par ce tribunal signifie que l’élaboration et la présentation d’un concept d’entretien n’a lieu ni dans le contexte d’une autorisation illimitée ni dans le cadre de la surveillance normale.

Les décisions de l’IFSN et les délais relatifs restent inchangés : toutes les centrales nucléaires, Mühleberg comprise, doivent apporter jusqu’à la fin du mois (31 mars 2012) la démonstration de sécurité concernant un tremblement de terre avec une fréquence de 10’000 ans.

Par ailleurs, la centrale de Mühleberg doit démontrer jusqu’à la fin juin comment elle peut installer un système de refroidissement supplémentaire indépendant de la rivière de l’Aare. L’IFSN a accepté une solution provisoire il y a quelques mois ; c’est pourquoi elle a permis à la centrale de reprendre ses activités en octobre dernier.

La Suisse, à l’instar de peu d’autres pays, continue de développer les exigences de sécurité au-delà des prescriptions légales. Les exploitants de centrales nucléaires doivent ainsi entretenir continuellement leurs installations sur la base de connaissances nouvelles.

Il faut encore le rappeler : les exploitants des centrales nucléaires suisses ont investi des milliards de francs dans leurs installations durant les dernières décennies. Il s’agissait pour eux de pouvoir tenir compte d’exigences qui se sont accrues en continu. Une catastrophe, telle qu’elle s’est produite à Fukushima, déclenche des investissements en Suisse à la hauteur de plusieurs milliards. La sécurité n’est pas un état, c’est un processus.

En constant, en tant qu’autorité de surveillance, que Fukushima ne pourrait pas se produire de cette manière en Suisse ; nous basons notre affirmation sur des analyses approfondies de l’accident de réacteur au Japon et sur les examens des centrales effectués depuis lors. Partant de ces analyses, le plan d’action 2012 a été élaboré. Avec ce plan, les enseignements tirés de Fukushima (Lessons learned) sont mis en œuvre, rendant les centrales nucléaires suisses encore plus sûres. D’après ce que nous savons, cette catastrophe nucléaire aurait pu être évitée si les standards internationaux et les recommandations correspondantes de l’IAEA avaient été respectés.

Dans le cadre de ma nouvelle fonction en tant que président de l’Association des autorités de régulation nucléaire d’Europe de l’ouest (Western European Nuclear Regulators Association WENRA), je vais m’engager afin que, grâce à des standards de sécurité harmonisés au niveau international, un prochain « Fukushima » soit empêché. Concernant la culture de sécurité, la Suisse donne un bon exemple.

Fukushima – ce terme renvoie désormais à une catastrophe nucléaire supplémentaire – a généré en Suisse un doute envers la sécurité de nos centrales nucléaires. Fukushima a aussi nui à l’image de l’énergie nucléaire en Suisse, de même qu’à la crédibilité de l’IFSN. Le fait de tirer des analogies sur la base d’événements négatifs réside dans la nature de l’homme. Il est évident que le mouvement anti-nucléaire a exploité le moment pour faire valoir des insinuations qui servaient ses intérêts : si l’autorité de surveillance japonaise n’a pas rempli sa tâche, pourquoi l’autorité de surveillance suisse y arriverait. De même, si les installations nucléaires ne sont pas sûres au Japon, pourquoi le seraient-elles en Suisse.

Nos standards de sécurité élevés et notre culture de sécurité poussée ne sont pas à minimiser. En comparaison, la Suisse profite à l’échelle internationale d’une excellente réputation. Les centrales nucléaires suisses appartiennent aux installations les plus sûres au monde. En tant qu’autorité de surveillance, nous agissons de manière complètement indépendante. Ceci s’est avéré encore il y quelques semaines.

Nous ne tenons compte pour nos décisions d’aucune réflexion d’ordre politique ou économique. Pour ces dernières, les exploitants sont responsables. Les citoyens politiquement actifs et intéressés se chargent quant à eux des questions politiques. Pour nous, la sécurité a la sécurité absolue. Nous fondons notre action sur la loi. Notre mandat est le suivant : nous surveillons la sécurité des centrales nucléaires dans l’intérêt de la population.

 

Hans Wanner
Directeur de l’IFSN